8 décembre : Ma vie venait de s’effondrer.
Aujourd’hui ce fus la pire journée de mon existence: inhumer ma femme et mes deux enfants. Je suis triste, malheureux je ne mange plus, je ne sors plus. Pourquoi suis-je sorti aller acheter du pain ce jour là ? Si j’étais resté je serai sûrement mort avec eux. Au moins, ma vie ne serait pas si solitaire. Je n’essaie même pas de m’imaginer leur souffrance. Quand je suis arrivé devant ma maison ce n’était plus qu’un immense brasier. Ils étaient déjà morts. Je n’ai même pas pu leur dire adieu.
Quand je rentrerais de ma rude journée qui m’accueillera dorénavant sur le pas de la porte ?, qui me fera des câlins, des sourires? Mes épaisses mains ne caresseront plus les denses chevelures bouclées couleurs blé de mes petits anges, mon esprit est sans cesse harcelé par ces innombrables questions.
Maintenant je suis seul et je resterai seul jusqu'à la fin de mes jours.
12 décembre : Je retournai au village chez un ami pour lui demander de m’héberger, service qu’il accepta, car mes petites économies ne me permettaient pas de rester indéfiniment à l’hôtel.
16 décembre : Quelle nuit horrible. Je n’ai pas fermé l’œil. Je ne cessais de me rappeler cet instant tragique. Les derniers mots à ma femme et mes enfants resteront gravés dans ma tête. Tout à coup, mes yeux se brouillent j’aperçois des flammes, des hurlements montaient de cet immense brasier. Et dire que je suis resté impuissant devant cela.
Je descendis prendre mon café avec mon ami Pierrot. Le déjeuner était prêt, et une lettre m’attendait devant mon bol. Je l’ouvris délicatement et la lue. Elle indiquait que mes amis étaient partis retrouver leur famille et qu’ils me laissaient la maison.
19 décembre : Depuis quelques jours je suis fiévreux, je ne cesse de trembler, et de plus je n’ai plus personne à qui me confier.
20 décembre : Je viens de consulter mon médecin « une grosse déprime ! » selon lui . De retour je traversai la forêt du « Rounchas », le lieu où j’ai enterré mes biens aimés. Je décidai de passer leur faire une petite visite. Je me suis mis à leur parler conscient que personne n’allait me répondre bien entendu. Soudain j’entendis une voix de femme qui me répondit. C’était ma femme.
Etais-je devenu fou? Pour vérifier cela, je fermai les yeux et les rouvris, je la vis toujours. Ce n’était pas un rêve ! Un silence s’installa, on se regarda dans les yeux, personne ne bougea. Elle se rapprocha de moi et posa sa main sur ma joue droite. Cet instant là fus formidable, je me sentis en sécurité, comme si tous mes chagrins avaient disparu. Je refermai les yeux pendant une seconde et elle disparut quel désespoir. Je décidai enfin de rentrer. La bise me glaçait le visage, je fermais le col de mon grand manteau. Dans la maison, la cheminée s’était éteinte, il y faisait aussi froid que dehors, je me résignai à aller me coucher.
23 décembre : Ce matin, en me levant, je ne me sentis pas bien du tout. Quand je suis allé dans la salle de bain, je me suis regardé dans le miroir. J’eus l’air d’un homme désespéré. Je découvris une brûlure sur ma joue droite, mais le plus étrange c’est qu’elle avait la forme d’une main…
Etais ce la main de ma tendre épouse. Ensuite je descendis dans le salon.
J’ouvris les grands volets de bois, la campagne avait revêtu son grand manteau blanc. Un grand calme s’était installé , l’immense ciel bleu et le les rayons scintillants du soleil me firent oublier un instant mon désarroi.
Là, sous mes yeux je vis mes enfants jouer dans la neige, ils avaient l’air heureux. Tout à coup on frappa à la porte, je sursautai. C’était François le facteur, il me salua et me remit une lettre que je décidai de ne pas ouvrir. Je retournai contempler ce magnifique paysage et mes enfants mais ils avaient disparu. Je remarquai quelque chose d’étrange ; la neige avait fondu où mes enfants jouaient!
Ma brûlure et maintenant la neige fondu, deux phénomènes que je ne pouvais expliquer. Au bout de quelques minutes un épais brouillard s’installa et la vallée s’assombrit.
24 décembre : Aujourd’hui, le pire réveillon de ma vie. Je vais le passer tout seul. Le brouillard était toujours là !il faisait très froid le givre collait aux carreaux! Ce soir là, je décidai de me rendre au café de la Gare, ou tous les ans des villageois réveillonnaient. Je m’installai au comptoir à coté de Marcel. Je commandai une eau de vie et me mis à ressasser mon passé, le boulanger ne m’écoutait plus mais moi je continuais à parler et je buvais de plus en plus pour noyer mon chagrin.
Mon ami s’en alla, je me retrouvai tout seul ! Celui-ci avait oublié son briquet sur le comptoir, alors je le saisit, le mis dans ma poche pour le lui rendre le lendemain, et je partis. Avant de rentrer chez moi, je décidai d’aller souhaiter un joyeux noël à ma femme et mes deux enfants. Il faisait très sombre le brouillard opaque m’aveuglait mais je continuai à marcher en direction de la forêt. Tout à coup, au loin, j’aperçus une petite lumière orangée qui attira mon regard. Plus je m’avançais, plus la petite lumière grossissait. Soudain, je crus entendre un bruit et sentir une présence dans mon dos mais je n’y portai pas attention. Je continuai de marcher vers cette lumière de plus en plus forte, et plus je m’approchai plus j’entendais le bruit des enfants qui chahutaient.
Quand j’arrivai près de leur tombe les bruits se firent plus distincts et je entendis « Papa, papa viens nous sauver ! rejoins nous ! aide nous ! au secours ! au secours… »Je me mis a courir et là je vis ma femme vêtue de blanc qui me tendait les bras. Je m’arrêtai de courir, elle s’approcha de moi et me dit « je souffre je ne peux vivre sans toi ! nous t’attendions viens !» ; A cet instant les enfants s’élancèrent vers moi et me sautèrent dans les bras, ma femme m’enlaça. Nous étions de nouveau ensemble. Je me sentis bien, et ressentis la chaleur de leur corps, je voulais que cet instant ne s’arrête jamais…
LA MONTAGNE,25 décembre
Rubrique Fait divers :
Huedour
« Le corps calciné d’un homme a été retrouvé près de la tombe d’une femme et de ses deux enfants. »
Nous supposons qu’il s’agit du mari.